Définir la violence.

En lisant mon journal ce matin, un autre triste constat. Je ne peux m’empêcher d’y voir une autre grande injustice. Un nouveau serrement de gorge, au propre comme au figuré. 

Le journal Le Devoir, titre en première page: Les thérapies pour hommes divisent. 

On y parle évidemment de la violence conjugale. De l’aide que certains hommes demandent, de celle dont ils ont, disent-ils, besoin, de celle qu’une trentaine d’organismes venant en aide aux hommes présentant des comportements violents fournissent. 

C’est une bonne chose me direz-vous. Ils vont chercher de l’aide, la lumière pointe au bout du tunnel, il y a de l’espoir pour le genre conjugal, mais où est le problème!? 

Le problème se trouve, entre autres, dans la citation de M. André Tardif, directeur général d’À coeur d’homme, organisme chapeautant la trentaine d’autres venant en aide aux hommes. Il mentionne en effet ne pas être ENTIÈREMENT d’accord avec la définition gouvernementale en matière de violence conjugale. Cette définition dit ceci: que la violence conjugale  » ne résulte pas d’une perte de contrôle, mais constitue, au contraire, un moyen choisi pour dominer l’autre personne et affirmer son pouvoir sur elle ». Il y ajoute son grain de sel en disant: qu’il faut « demeurer ouvert à toutes les possibilités qui pourraient faire en sorte qu’une personne ou deux personnes dans un couple arrivent à ce qu’une violence s’installe ».  

Or, pour toute personne ayant vécu de la violence conjugale, ce simple désaccord n’a, en fait, rien de simple, et est un affront, joint à l’insulte. On y réitère la faute de la victime, la fausse croyance que « it takes two to tango ». Il n’y a rien de plus faux! 

Pendant que les gouvernements (un peu partout dans le monde, pas seulement en Amérique) coupent drastiquement les subventions aux centres pour femmes victimes de violence, en ferment des centaines, et que des milliers de femmes se font refuser, chaque année, un accès à ces centres et restent donc plus exposées au danger, le financement des centres pour hommes, lui, a littéralement explosé, passant de 355 000$ en 2017-18 à près de 2,4 millions en 2019-20! Cette somme proviendrait, selon le journal, du Plan d’action gouvernemental en matière de violence conjugale 2018-2023. 

Comment ce plan d’action, qui, à priori, semble ne pas faire de distinction entre l’agresseur et la victime dans l’octroi de son pécule, du moins, pas selon le titre du projet, peut, de façon aussi drastique et dramatique, couper d’un côté et donner de l’autre?! Comment en venir à prendre la décision de retirer suffisamment les vivres aux organismes pour femmes victimes de violence au point où ces organismes doivent fermer leurs portes, et en même temps, donner les sommes aux organismes venant en aide aux hommes au point de faire exploser leur financement?! Ça me dépasse!

M. Tardif ajoute, comme si ce n’était pas assez, que l’origine culturelle d’une personne puisse justifier le fait de violence dans une relation. Quelle supposition est posée en prémisse à cette affirmation ici? Que certaines cultures acceptent la violence, que pour elles c’est normal, qu’ils ne sont pas comme nous qui traitons cette maladie, que nous sommes plus civilisés? Cette phrase m’amène à me poser un tas de questions!

Je vous invite à lire cet article du Devoir, et à le critiquer dans sa forme simple, c’est-à-dire au mot pour mot. 

S’il y a bien une chose qu’on comprend en pataugeant (et parfois en se noyant) dans les eaux de la violence conjugale, c’est que tout commence… par les mots. Chaque parole, chaque phrase, chaque mot, chaque intonation de voix n’est ni naïve, ni banale. Ils instaurent un climat, une forme de pensée, une acceptation des gestes permis ou non, une loi non-écrite, qui dictera, de plus en plus profondément à la victime, sur quel pied danser, que ce soit sur un tango ou pas… Et M. Tardif déconstruit, en douceur diront certains, remet en question, humblement et à coeur ouvert diront les mêmes, les montants et tenants de ce qui échafaude la prise de pouvoir d’un individu sur un.e autre.

À compter le nombre de féminicides qui passent dans les journaux américains, canadiens et français depuis trop longtemps, il serait temps de cesser de victimiser les agresseurs en supposant leur guérison miraculeuse à coup d’amour et de compréhension (comme le font les personnes qui pensent pouvoir les changer au début de leur relation amoureuse, pensant être celles qui sauront faire une assez grande différence dans la vie de ces personnes « blessées ») et arrêter de les acquitter lorsqu’ils sont finalement traînés devant les tribunaux, ou de ne leur donner que des sentences bonbons qui leur permettront de sortir au bout de quelques mois. 

Bref, tout cet article suppose une empathie et une compréhension envers ces hommes qui, le semblent-ils, sont victimes de leurs propres comportements violents.

Sachons reconnaître les vraies victimes. Sortez les juges vengeurs (qui ne croient aucune femme) de leur trône qu’ils pensent acquis par droit divin. Sortez les policiers qui protègent les hommes lors d’appels pour violence conjugale. Financez les centres d’hébergement pour femmes victimes de violence. Établissez de vraies égalités salariales qui permettront aux femmes d’avoir moins peur de quitter leur conjoint violent par faute de moyens financiers pour y arriver. Faites respecter les ordonnances restrictives et mettez les femmes et les enfants en lieu sûr lorsqu’elles affirment subir de la violence. Cessez de remettre leur parole en question.

Les vraies victimes ne sont pas celles qui ont réussi à amadouer le système pour s’octroyer le financement prévu pour celles qui ont subi leurs coups une première fois. Il semblerait que les agresseurs aient réussi à couper les vivres de leur ex jusque dans les fonds gouvernementaux prévus pour tenter de leur sauver la vie…

Une belle merde tout ça… 

 

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